Cancérologie 26

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Partie II - Localisations
Chapitre 18 - Cancers des voies aéro-digestives supérieures

 

Sections

Sous-sections

18.1 - Généralités
18.2 - Cancers de la cavité buccale et de l'oropharynx
18.3 - Cancers de l'oropharynx
18.4 - Cancers du rhinopharynx (ou cavum)
18.5 - Cancers du larynx et de l'hypopharynx
18.6 - Cancers de la cavité aérienne de la face
18.7 - Points essentiels

 

18.1.1 - Introduction
18.1.2 - Anatomopathologie
18.1.3 - Rappel anatomique
18.1.4 - Les progrès récents (dans les 10 dernières années) sont liés

 

 

Auteurs : F. Baillet, P. Fouret, J.C. Bertrand, G. Lamas

18.1 Généralités

18.1.1 Introduction

Les cancers des voies aéro digestives supérieures (VADS) sont des cancers fréquents en France où ils représentent environ 10 % de l'ensemble des cancers, mais avec une grande différence entre les hommes (90 % des cas) et les femmes (10 %). A noter cependant que la fréquence chez la femme est en augmentation constante depuis 30 ans. Chez l'homme ce sont les quatrièmes cancers en fréquence après ceux de la prostate, des bronches, du colon et du rectum. Il y a environ 17 000 nouveaux cancers par an et 10 500 décès.

Dans 90 % des cas ces cancers sont en rapport avec une intoxication alcoolo-tabagique. Font exception les cancers du cavum (virus d'Epstein Barr), les cancers des cavités aériennes de la face (travailleurs du bois, ébénistes, menuisiers), certains cancers du larynx qui peuvent être en rapport avec un surmenage vocal chronique, certains cancers de la cavité buccale qui sont en rapport avec des dysplasies (lichen).

Les localisations cancéreuses des VADS sont souvent multiples de façon synchrone (en même temps) ou métachrone (de façon décalée dans le temps). Pour les cancers des VADS habituels, c'est-à-dire à l'exception des cancers du cavum et des cavités aériennes de la face, la recherche systématique d'un 2ème cancer avec biopsies des zones douteuses permet de trouver une 2ème localisation dans environ 20 % des cas. L'avenir des malades porteurs initialement de ces mêmes cancers des VADS habituels reste menacé non seulement par une récidive de la tumeur primitive mais également par l'apparition secondaire d'un 2ème cancer des VADS, bronchique ou oesophagien. Au-delà de 5 ans le risque de 2ème cancer devient plus important que le risque de récidive de la tumeur initiale.

18.1.2 Anatomopathologie

Dans plus de 90 % des cas il s'agit d'épithéliomas épidermoïdes. Dans la moitié des cancers des cavités aériennes de la face il s'agit d'épithéliomas glandulaires (adénocarcinomes) et dans la moitié des cancers du cavum (rhinopharynx) de carcinome indifférencié de type nasopharyngien (UCNT).

Enfin au niveau de l'Anneau de Waldeyer là où se trouvent des formations lymphoïdes, à savoir le cavum, les amygdales et la base de la langue, on peut observer des lymphomes malins. Historiquement ces derniers ont été les premiers à être guéris, dans 30 % des cas, grâce à la radiothérapie par 200 KV parce qu'ils étaient peu profondément situés et qu'une dose totale de 40 Gy suffit pour les stériliser localement.

Les détails de l'anatomopathologie sont donnés avec les principales localisations.

18.1.3 Rappel anatomique

L'anatomie concernée par les cancers des VADS est complexe. Selon le siège initial et les structures envahies le diagnostic, le traitement et le pronostic varient. Les différentes localisations sont regroupées en cancers de la cavité buccale (25 % des cas), cancers de l'oropharynx (25 %), cancers du larynx (25 %), cancers de l'hypopharynx (15 %), cancers du cavum (7 %), cancers des cavités aériennes de la face (3 %).

Les schémas ci-joints permettent de représenter l'anatomie concernée par ces cancers.


18.1.4 Les progrès récents (dans les 10 dernières années) sont liés
  • à ceux de l'imagerie (TDM et IRM) qui permettent d'avoir une meilleure connaissance des extensions,
  • à ceux de la chirurgie qui est souvent moins mutilante et plus réparatrice (chirurgies conservatrices du larynx, buccopharyngectomies transmaxillaires conservatrices, curages ganglionnaires cervicaux conservant les organes de voisinage non atteints, pertes de substance compensées par lambeaux…),
  • à ceux de la radiothérapie qui est localement devenue plus efficace à l'égard des tumeurs de grande taille soit en modifiant le facteur temps (plus de fractions avec un temps de traitement total plus court ou avec une dose totale plus élevée) soit en l'associant à la chimiothérapie par dérivés du platine. Dans ce dernier cas on améliore en plus la survie.
  • à ceux de la chimiothérapie qui, utilisée en premier, a permis de sélectionner parmi les cancers normalement traités par chirurgie radicale non conservatrice ceux qui pouvaient bénéficier d'une radiothérapie exclusive (cancers du larynx et de l'hypopharynx).

 

18.1 - Généralités
18.2 - Cancers de la cavité buccale et de l'oropharynx
18.3 - Cancers de l'oropharynx
18.4 - Cancers du rhinopharynx (ou cavum)
18.5 - Cancers du larynx et de l'hypopharynx
18.6 - Cancers de la cavité aérienne de la face
18.7 - Points essentiels

18.1.1 - Introduction
18.1.2 - Anatomopathologie
18.1.3 - Rappel anatomique
18.1.4 - Les progrès récents (dans les 10 dernières années) sont liés

 

Partie II - Localisations
Chapitre 18 - Cancers des voies aéro-digestives supérieures

 

18.2 - Cancers de la cavité buccale et de l'oropharynx

 

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18.1 - Généralités
18.2 - Cancers de la cavité buccale et de l'oropharynx
18.3 - Cancers de l'oropharynx
18.4 - Cancers du rhinopharynx (ou cavum)
18.5 - Cancers du larynx et de l'hypopharynx
18.6 - Cancers de la cavité aérienne de la face
18.7 - Points essentiels

 

18.2.1 - Anatomopathologie
18.2.2 - Diagnostic
18.2.3 - Traitement
18.2.4 - Surveillance
18.2.5 - Résultats

 

18.2.1.1 - Etiologie
18.2.1.2 - Formes macroscopiques
18.2.1.3 - Forme histologique commune
18.2.1.4 - Formes histologiques particulières
18.2.1.5 - Extension
18.2.1.6 - Apport de l'examen anatomo-pathologique

 

 

Ils représentent la moitié des cancers ORL.


18.2.1 Anatomopathologie

La cavité buccale comprend la langue mobile et le plancher de la bouche où sont la plupart des cancers, et par, ailleurs, les gencives, les faces internes de joue, la muqueuse de recouvrement de la branche montante du maxillaire inférieur (RBMI) et de la voûte palatine.

La langue comprend la portion mobile (cavité orale) en avant du V lingual et la base de langue qui fait partie de l'oropharynx. L'oropharynx comprend de plus l'amygdale et la loge amygdalienne, le pilier antérieur du voile, le palais mou et la paroi oropharyngée latérale et postérieure.

Les lymphatiques sont nombreux, et se drainent dans les ganglions sous-mentaux et sous maxillaires (portion mobile et plancher), dans les ganglions jugulaires supérieurs, moyens, inférieurs et sus-claviculaires. Les lymphatiques du mur pharyngé postérieur se drainent dans les ganglions rétropharyngés.

18.2.1.1 Etiologie

Les cancers de la cavité buccale sont précédés dans environ 10 % des cas par des lésions précancéreuses. Il peut s'agir :

  • de lésions blanches ou leucoplasies (lichen) = plaque blanchâtre ne se détachant pas par grattage liée au plan histologique à une accumulation de kératine (kératose) en surface. Les leucoplasies inhomogènes et de la face ventrale de la langue sont suspectes. La classification des lésions est controversée. La présence de dysplasie ou d'un CIS (carcinome in situ) implique un risque significatif de progression vers le carcinome épidermoïde infiltrant.
  • de lésions rouges ou érythroplasie = plaque rouge, souvent étendue, moins fréquente mais plus inquiétante que les leucoplasies, correspondant à un épithélium atrophique recouvrant un réseau vasculaire télangiectasique. La lésion intra-épithéliale précancéreuse correspond à une dysplasie sévère/CIS et comporte un risque élevé de progression. Dans 50 % des cas, la lésion intra-épithéliale est déjà associée un carcinome épidermoïde infiltrant.
18.2.1.2 Formes macroscopiques

Il s'agit de tumeurs exophytiques ou endophytiques (plus péjoratives).

18.2.1.3 Forme histologique commune

Il s'agit de carcinomes épidermoides infiltrants (95 % des cas). Certains éléments seraient plus péjoratifs : l'atteinte nerveuse ou vasculaire, la profondeur de l'infiltration tumorale, l'infiltration sous forme de travées grêles.

Certaines variétés de carcinome épidermoide peuvent être observées dans la cavité buccale ou l'oropharynx :

  • carcinome verruqueux : son aspect est analogue au carcinome verruqueux laryngé. Il se présente parfois sous la forme d'une nappe papillomateuse hyperkératosique (« papillomatose orale floride ») ; le diagnostic repose sur l'examen en totalité de la tumeur, car cette tumeur à malignité locale peut s'associer à un carcinome épidermoïde infiltrant ;
  • carcinome sarcomatoïde (cancer à cellules fusiformes)
  • carcinome basaloïde
  • carcinome adénosquameux.
18.2.1.4 Formes histologiques particulières

Ce sont les tumeurs à point de départ non muqueux :

  • tumeurs des glandes salivaires (tumeurs muco-épidermoïdes, carcinomes adénoïdes kystiques)
  • tumeurs osseuses (ostéosarcomes en particulier)
  • métastases des tissus mous ou osseuses.
18.2.1.5 Extension

Les cancers de la portion mobile de la langue et du plancher de la bouche ont, par comparaison avec les autres cancers de la cavité buccale, une plus grande tendance à donner des extensions ganglionnaires : 15 à 75 % des cas selon le stade d'extension de la tumeur au site primaire (T). Les sites les plus souvent atteints sont II, puis I, III et IV. Les métastases sont bilatérales dans 25 % des cas. L'atteinte ganglionnaire est le facteur pronostic majeur.

Les cancers de la base de langue sont classés dans les cancers de l'oropharynx. Ce sont des tumeurs agressives et silencieuses, découvertes à des stades avancés (90 % sont des stades III ou IV) Elles peuvent infiltrer les vallécules, la loge hyo-thyro-épiglottique, et le reste du larynx (modification de la voix) ou s'étendre au mur pharyngé latéral et aux nerfs crâniens (otalgie). Les métastases ganglionnaires sont fréquentes même pour les T1 (70 % cas), souvent bilatérales (30 % cas), souvent révélatrices. Les extensions ganglionnaires intéressent en règle les niveaux II et III, et plus souvent les niveaux IV, et V que les autres localisations. Par contre, l'os mandibulaire est rarement atteint.

Les cancers de l'amygdale sont souvent avancés et s'étendent vers la base de langue et le mur pharyngé latéral. Les métastases ganglionnaires sont fréquentes même pour les stades précoces.

Les cancers du pilier antérieur de l'amygdale tendent à être superficiels et s'étendent sur une large zone vers le palais mou, la muqueuse buccale.

Les cancers du palais mou peuvent rester à un stade précoce en s'étendant de façon très superficielle vers le palais dur et les piliers. Les métastases ganglionnaires sont volontiers bilatérales quand la tumeur s'étend au delà du plan médian.

Les cancers du mur pharyngé s'étendent vers le nasopharynx, le fascia prévertébral, les sinus piriformes et le mur hypopharyngé postérieur. Les métastases ganglionnaires sont fréquentes, intéressent les niveaux II et III ainsi que les ganglions rétropharyngés. Elles sont souvent bilatérales.

18.2.1.6 Apport de l'examen anatomo-pathologique

Il est essentiel pour établir le diagnostic de la tumeur.

Au niveau de la pièce opératoire, il précise l'extension locale (pT), et notamment le statut des marges d'exérèse, et régionale (pN), ce qui détermine le pronostic. Par exemple environ 25 % des marges d'exérèse sont envahies en per-opératoire en cas de chirurgie initiale pour les cancers de base de langue à des stades avancés.

L'examen histologique est essentiel pour déterminer à quel stade en est une dysplasie précancéreuse (dysplasie de grade peu élevé, dysplasie sévère, épithélioma in situ ou épithélioma déjà infiltrant).

Ces lésions précancéreuses lorsqu'elles sont découvertes doivent être surveillées et traitées avant la progression vers le carcinome épidermoïde invasif.

 

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18.2 - Cancers de la cavité buccale et de l'oropharynx
18.3 - Cancers de l'oropharynx
18.4 - Cancers du rhinopharynx (ou cavum)
18.5 - Cancers du larynx et de l'hypopharynx
18.6 - Cancers de la cavité aérienne de la face
18.7 - Points essentiels

18.2.1 - Anatomopathologie
18.2.2 - Diagnostic
18.2.3 - Traitement
18.2.4 - Surveillance
18.2.5 - Résultats

18.2.1.1 - Etiologie
18.2.1.2 - Formes macroscopiques
18.2.1.3 - Forme histologique commune
18.2.1.4 - Formes histologiques particulières
18.2.1.5 - Extension
18.2.1.6 - Apport de l'examen anatomo-pathologique

 

 

 

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Chapitre 18 - Cancers des voies aéro-digestives supérieures

 

18.2 - Cancers de la cavité buccale et de l'oropharynx

18.2.2 - Diagnostic

 

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18.1 - Généralités
18.2 - Cancers de la cavité buccale et de l'oropharynx
18.3 - Cancers de l'oropharynx
18.4 - Cancers du rhinopharynx (ou cavum)
18.5 - Cancers du larynx et de l'hypopharynx
18.6 - Cancers de la cavité aérienne de la face
18.7 - Points essentiels

 

18.2.1 - Anatomopathologie
18.2.2 - Diagnostic
18.2.3 - Traitement
18.2.4 - Surveillance
18.2.5 - Résultats

 

18.2.2.1 - Diagnostic positif
18.2.2.2 - Diagnostic d'extension

 

 

18.2.2.1 Diagnostic positif

Les signes révélateurs sont une gêne plus ou moins douloureuse là où se trouve l'anomalie, des crachats sanglants, rarement une otalgie ou une adénopathie isolée.

Ces troubles fonctionnels ont ou une caractéristique importante : celle de persister. Une durée au-delà d'une quinzaine de jours les rend suspects.

L'examen, par la vue et la palpation, permet de trouver un bourgeonnement et/ou une ulcération qui saigne habituellement au contact et s'accompagne d'une infiltration sous jacente.

Comme diagnostic différentiel il y a l'ulcération traumatique ou infectieuse. Dans ces cas il n'y a pas d'infiltration véritable et les anomalies disparaissent rapidement avec des traitements locaux et des antibiotiques et la suppression de l'agent vulnérant (dent délabrée, crochet de prothèse).

Le fait de trouver une leucoplasie ou une érythroplasie doit faire rechercher à leur niveau une zone suspecte.

La biopsie, faite au moindre doute, permet seule de faire le diagnostic.

18.2.2.2 Diagnostic d'extension

Sur le plan local, on précise le siège, l'étendue de l'induration (en centimètres) et l'aspect macroscopique. Ces caractéristiques sont écrites et complétées par un schéma. Au niveau de la cavité buccale les anomalies peuvent être aussi photographiées. L'infiltration est parfois mieux définie après un traitement antibiotique de quelques jours. Pour les tumeurs s'étendant près des structures osseuses un bilan radiologique est nécessaire pour rechercher une éventuelle extension : TDM (scanner) voire IRM.

Sur le plan régional, on recherche une adénopathie cervicale. Si on en trouve une ou plusieurs on en précise la taille, le siège, la mobilité, on en fait une description écrite avec des schémas et si possible des photos (polaroïds) pour la suite du traitement. Le diagnostic différentiel habituel est celui d'une sous-maxillite qui est une tuméfaction oblongue allongée d'avant en arrière, aplatie transversalement que l'on n'arrive pas à faire rouler sur le maxillaire. L'exploration clinique des aires ganglionnaires est complétée par un TDM.

A distance, on recherche d'éventuelles métastases qui existent rarement d'emblée sauf pour les tumeurs de grande taille (au minimum radiographies pulmonaires et échographie hépatique). Elles peuvent être pulmonaires, hépatiques ou osseuses.

On recherche par ailleurs une deuxième localisation cancéreuse par un examen systématique soigneux des VADS (par endoscopie) avec en plus fibroscopie oesophagienne et bronchique.

Enfin on précise les antécédents du malade et on étudie son état général : amaigrissement (poids actuel comparativement au poids habituel), index de performance (OMS, Karnofsky). Souvent on se trouve devant un malade ayant un âge physiologique supérieur à son âge légal. Les pathologies vasculaires et hépatiques lorsqu'elles sont associées peuvent rendre difficile la thérapeutique.

Le TNM est appliqué à la fin de l'examen.

Classification TNM 2002 (cavité buccale + oropharynx)

Elle est basée sur la clinique et l'imagerie.

T1 : T 2 cm

T2 : 2 cm < T 4 cm

T3 : T > 4 cm

T4 : Envahissement de structures adjacentes (muscles extrinsèques de la langue : hyoglosse, styloglosse, génioglosse, palatoglosse ; mais également à l'os).

N0 : Pas d'adénopathie régionale

N1 : Adénopathie métastatique unique unilatérale, 3 cm

N2a :Adénopathie métastatique unique unilatérale, > 3cm 6 cm

N2b : Adénopathies métastatiques homolatérales multiples, 6 cm

N2c : Adénopathies métastatiques bilatérales ou controlatérales 6 cm

N3 : Adénopathie métastatique > 6 cm

M0 : Absence de métastase viscérale

M1 : Présence de métastase(s) viscérale(s)

Stades

I : T1N0

 

 

 

 

 

 

II : T2N0

 

 

 

 

 

 

III : T1N1, T2N1, T3N0 et N1

 

 

 

 

 

 

IV : T4N0N1, tous T N2 et N3

 

 

 

 

 

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18.2.3 - Traitement
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18.2.2.1 - Diagnostic positif
18.2.2.2 - Diagnostic d'extension

 

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18.2.2 - Diagnostic
18.2.3 - Traitement
18.2.4 - Surveillance
18.2.5 - Résultats

 

18.2.3.1 - Méthodes
18.2.3.2 - Indications

 

 

18.2.3 Traitement
18.2.3.1 Méthodes
  1. La chirurgie de la tumeur primitive. Elle est plus ou moins conservatrice de la fonction selon l'extension des lésions. Elle peut être limitée ou étendue et alors avec réparation par lambeau comblant la perte de substance. Elle peut s'accompagner d'exérèse osseuse avec interruption ou non de la continuité. Dans ce dernier cas la séquelle principale est une perte de la mastication et accessoirement une modification de l'esthétique du visage. Des tentatives sont souvent faites pour essayer de compenser cette interruption avec des prothèses et des greffes qui ne sont pas toujours couronnées de succès et qui supportent plus ou moins bien la fréquente radiothérapie associée.
    Cette chirurgie s'accompagne d'une analyse histologique de la pièce : la résection est satisfaisante, non satisfaisante ou limite. Dans les deux derniers cas un traitement complémentaire est nécessaire : reprise chirurgicales si possible ou radiothérapie.
    La chirurgie ganglionnaire est exploratrice et thérapeutique. L'importance des exérèses est fonction de l'importance de l'extension ganglionnaire. Autrefois le curage était radical systématique en cas d'envahissement ganglionnaire enlevant non seulement les aires ganglionnaires mais le sterno-cléïdo-mastoïdien, la jugulaire interne, et la branche externe du spinal. Maintenant on réalise des curages fonctionnels préservant les organes ci-dessus chaque fois que possible. Cette chirurgie est suivie également d'une analyse histologique qui précise le nombre de ganglions identifiés, le nombre de ganglions envahis, leur siège, s'ils sont en rupture capsulaire ou non (N-, N+, RC- ou RC+). Une radiothérapie externe complémentaire est indispensable en cas de N+ multiple ou en cas de RC+.
  2. La curiethérapie de la tumeur primitive est faite par Iridium 192 à la dose de 65 Gy. Avec un faible écartement des lignes (10mm), elle est la technique la plus efficace localement parmi les techniques d'irradiation mais est contre-indiquée si la tumeur est au contact de l'os. En effet, avec cette technique, il y a nécrose osseuse à partir de 50 Gy au niveau de l'os.
  3. La radiothérapie externe est faite à la dose de 70 Gy en étalement classique de 5x 2 Gy au point ICRU par semaine au niveau de la tumeur primitive. Pour les grandes tumeurs (T3-T4 N2-N3) on utilise maintenant des radiothérapies modifiées plus efficaces localement : bi-fractionnées avec dose totale augmentée, accélérées, ou surtout avec traitement radio-sensibilisant.
    Il peut y avoir combinaison de la radiothérapie externe et de la curiethérapie. Dans ce cas, on commence par 40 y de radiothérapie externe et on termine par 30 Gy par curiethérapie.
    La radiothérapie externe au niveau des adénopathies cliniquement palpées et précisées par le TDM, est faite selon les mêmes modalités que pour la tumeur primitive. Ces doses élevées sont appliquées à un volume réduit correspondant aux adénopathies plus une marge de sécurité d'où l'importance d'un repérage initial correct car les adénopathies se modifient beaucoup voire disparaissent après le 1er temps d'irradiation large des aires ganglionnaires ou même après une chimiothérapie première (néo-adjuvante).
    L'ensemble des aires ganglionnaires peut être irradié pour traitement de la maladie infra-clinique avec des différences de dose selon l'importance supposée de celle-ci. La dose est de 40 Gy pour les N0, 50 Gy pour les formes avec adénopathie(s) clinique(s), 40 Gy pour les N- pour lesquels on peut également se contenter de surveillance, 50 Gy pour les N+ RC- et 60 Gy pour les N+ RC+.
    La radiothérapie peut donner des complications qui doivent être, autant que possible, prévenues et traitées.
    • La radio nécrose est une complication classique, non exceptionnelle de la curiethérapie. Les facteurs favorisant la nécrose sont des lignes très écartées, un volume traité important, un débit horaire élevé, la persistance de l'intoxication alcoolo-tabagique, une dénutrition et, pour la nécrose osseuse, un dispositif radioactif au contact de l'os. En tenant compte de ces facteurs, on peut pratiquement faire disparaître le risque de nécrose. Lorsque celle-ci est installée, elle ne doit pas être confondue avec une récidive. Dans ce domaine il ne faut pas faire de biopsie à tort et à travers car s'il s'agit d'une nécrose, la biopsie agrandit la perte de substance et risque de prolonger les troubles. Un traitement antibiotique permet en général de mieux examiner la région anormale et de constater qu'il n'y a pas d'infiltration véritable.
      Une radionécrose osseuse peut également compliquer une radiothérapie externe, en particulier si une dent en mauvais état a été laissée dans le volume irradié ou si secondairement une dent initialement en bon état s'est altérée (carie sur hyposialie sans traitement fluoré préventif). L'avulsion d'une dent en zone irradiée expose à cette complication. Pour en réduire le risque il faut encadrer l'avulsion par un traitement antibiotique systématique.
      Pour diminuer ce type de complication une mise en état de la bouche est nécessaire avant d'entreprendre une radiothérapie concernant la cavité buccale. Elle consiste à enlever les dents en mauvais état qui seront dans le volume irradié et, ailleurs, les dents non récupérables, les chicots. Le tout doit être fait rapidement, idéalement lors de l'endoscopie, pour ne pas retarder le début du traitement.
      Le traitement des nécroses fait appel aux antibiotiques au long cours, aux antalgiques, à une bonne nutrition, à l'arrêt de l'intoxication alcoolo-tabagique, à la pentoxyfilline (Torental 400) et enfin si nécessaire à l'oxygénothérapie hyperbare ou plus simplement au carbogène. En dernier recours, si tous les traitements sont inefficaces, ce qui est rare, on peut réaliser l'exérèse de la zone nécrotique, muqueuse et/ou osseuse en passant au large.
    • La diminution de la sécrétion salivaire est liée au fait que les glandes salivaires se trouvent dans le volume irradié très souvent : au moins 50 % en cas d'irradiation des aires ganglionnaires, 80 % en cas de tumeurs de l'oropharynx et 100 % en cas de tumeurs de la cavité buccale ou du cavum. Eviter cette complication est difficile sur le plan technique. Si les doses n'ont pas été trop élevées, la salive revient progressivement en 6 à 12 mois. Outre le désagrément, cette diminution entraîne une pathologie dentaire fréquente (constitution de caries). Cette dernière complication est devenue maintenant presque inexistante grâce à une prophylaxie fluorée systématique consistant à la mise en place de gel fluoré dans des gouttières (faites sur mesure) pendant quelques minutes tous les jours tant que la salive reste anormale.
      La réalisation de caches personnalisés interposés dans les faisceaux d'irradiation permet de réduire le volume de glandes salivaires irradié dans certains cas. De même l'utilisation de la technique de la radiothérapie conformationnelle. Enfin l'emploi d'Amifostine (Ethyol) juste avant les séances de radiothérapie réduit la fréquence des complications salivaires.
  4. Les associations radio-chirurgicales
    On a très souvent chirurgie sur la tumeur et les aires ganglionnaires (T + N), puis radiothérapie externe sur les mêmes structures à doses adaptées au résultat de l'analyse histologique de la pièce opératoire. Si la résection est histologiquement insuffisante quelque part, on applique à ce niveau une dose de radiothérapie exclusive (dose entière). Il arrive parfois également que la chirurgie ait été utilisée seule et que, pour cause de récidive, on face appel à la radiothérapie dans un but de rattrapage. Elle se fait dans ce cas à doses entières.
    La chirurgie peut être aussi de rattrapage après échec d'une radiothérapie à doses entières sur T + N. Dans ce domaine des progrès importants ont été faits grâce à l'utilisation des lambeaux. La chirurgie est devenue plus efficace avec une mortalité et morbidité postopératoires réduites.
  5. La chimiothérapie
    Elle est surtout réalisée à base de dérivés du Platine (Cisplatine et Carboplatine) avec du 5 FU. En première ligne cette chimiothérapie peut donner 20 à 40 % de réponses cliniques complètes. Ces réponses complètes incitent à faire une thérapeutique conservatrice lorsque initialement était prévue une chirurgie non conservatrice.
    En post-opératoire, à titre systématique, en adjuvant, pour réduire la fréquence des récidives et des évolutions à distance, la chimiothérapie s'est révélée inefficace.
    Cette chimiothérapie est également utilisée pour les formes métastasées ou récidivées ainsi que le Methotrexate seul (USA). Au long cours la chimiothérapie est difficile à supporter compte tenu du terrain.
    On a vu qu'une chimiothérapie à dose réduite est associée à la radiothérapie de façon concomitante pour augmenter l'efficacité de la radiothérapie externe des tumeurs de grande taille.
18.2.3.2 Indications
  1. Pour les T1-T2 à distance des structures osseuses, on utilise la curiethérapie ou la chirurgie.
  2. Pour les T1-T2 proches de l'os, on utilise la chirurgie.
  3. Pour les T3-T4, on utilise la chirurgie si elle est localement possible, et dans ce cas on la fait suivre de radiothérapie externe car l'exérèse peut être considérée comme systématiquement «  limite », sinon on utilise une radiothérapie externe (radio-chimiothérapie concomitante). Dans cette catégorie, on a intérêt à commencer le traitement par une chimiothérapie première et en cas de réponse complète, on peut remplacer la chirurgie initialement prévue par une radiothérapie externe (radio-chimiothérapie concomitante).
  4. Enfin si l'état général du malade le rend inopérable (tares, âge), on réalise une radiothérapie externe (radio-chimiothérapie concomitante avec doses de chimiothérapie adaptées ou radiothérapie externe seule).
  5. Pour les aires ganglionnaires, en pratique, l'attitude décidée est celle qui correspond au traitement de la tumeur primitive :
    • s'il y a une chirurgie pour la tumeur primitive, on réalise un curage,
    • s'il y a une radiothérapie externe de la tumeur primitive on réalise une radiothérapie externe des aires ganglionnaires,
    • s'il y a une curiethérapie de la tumeur primitive on a le choix entre le curage systématique ou la simple surveillance en cas de N0.


Les résultats sont alors identiques mais il faut être certain que le malade viendra bien en consultation de surveillance, ce qui est parfois hasardeux compte-tenu du contexte alcoolo-tabagique : dans le doute, la prudence est de réaliser un curage systématique. En cas d'adénopathie palpable on préfère remplacer la curiethérapie par la chirurgie qui traite alors la tumeur et les aires ganglionnaires.

18.2.4 Surveillance

Une surveillance régulière est réalisée en recherchant une récidive tumorale ou ganglionnaire dont 90 % des cas surviennent dans les 2 premières années. Mais également on recherche l'apparition d'une deuxième localisation aux VADS, oesophagienne ou bronchique. Ces deuxièmes localisations continuent d'apparaître au delà des 3 premières années avec une fréquence pratiquement identique quelque soit le délai écoulé en sachant que ces deuxièmes localisations sont cependant moins fréquentes chez les sujets ayant cessé toute intoxication alcoolo-tabagique. Enfin on peut trouver une autre pathologie associée en rapport avec le vieillissement prématuré que provoque l'intoxication alcoolo-tabagique et les complications classiques de l'alcoolo-tababagisme (foie, système nerveux, artères).

Cette surveillance est importante car elle permet de déceler, éventuellement à temps, une récidive ou une deuxième localisation susceptible de bénéficier d'un traitement efficace. Elle permet également d'inciter le malade à cesser toute intoxication alcoolo-tabagique, ce qui a pour effet de réduire la fréquence des récidives, des deuxièmes localisations et des complications. La surveillance porte également sur les complications que l'on décèle et que l'on traite autant que possible.

Fréquemment ces malades ont besoin d'un soutien psycho-social pour améliorer leur situation personnelle (arrêt des intoxications), familiale et sociale.

Cette surveillance est volontiers faite par 3 médecins, le généraliste qui se trouve en situation de proximité et qui réadresse au spécialiste ou au cancérologue le malade en cas de symptomatologie anormale, le cancérologue qui a contribué au traitement loco-régional et le spécialiste d'organes ou le chirurgien. Cette surveillance à plusieurs donne une sécurité au médecin généraliste et permet au spécialiste de bien juger les résultats obtenus y compris dans le détail des complications.

18.2.5 Résultats

(survie, pronostic, qualité de vie)

La survie à 5 ans est approximativement :

Selon T :

T1-T2 : 45 %

T3-T4 : 15-20 %

Selon N :

N0 : 40 %

Np : (adénopathies palpables) 20 %

N- : 50 %

N+ : 25 %

N+ RC- : 30 %

N+ RC+ : 15 %.

La qualité de vie dépend des séquelles des traitements. Il peut y avoir une gêne à la phonation, à la mastication, à la déglutition, une réduction du goût, un manque de salive gênant, des douleurs, une modification de l'aspect extérieur etc… Toutes ces difficultés ont été volontiers considérées longtemps comme étant le prix à payer pour la guérison. On attache maintenant de plus en plus d'importance à ces séquelles dans le but d'en réduire la fréquence. Les progrès récents se sont faits plus en terme de qualité de survie qu'en taux de survie globale.

 

18.1 - Généralités
18.2 - Cancers de la cavité buccale et de l'oropharynx
18.3 - Cancers de l'oropharynx
18.4 - Cancers du rhinopharynx (ou cavum)
18.5 - Cancers du larynx et de l'hypopharynx
18.6 - Cancers de la cavité aérienne de la face
18.7 - Points essentiels

18.2.1 - Anatomopathologie
18.2.2 - Diagnostic
18.2.3 - Traitement
18.2.4 - Surveillance
18.2.5 - Résultats

18.2.3.1 - Méthodes
18.2.3.2 - Indications

 

Publié dans MEDECINE

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